Une réflexion pascale

A l’heure où nous attendons le discours du Président, un lundi d’avril, pour connaître la suite, la durée de prolongation de ce confinement inédit, de nouvelles mesures contraignantes, je ne sais plus quoi penser, moi.

A l’heure où chacun pense à ce qu’il fera après cet enfermement, les yeux brillants de verres en terrasses entre amis, de retrouvailles familiales émues, la carte bancaire brûlante d’une virée shopping pour acheter autre chose que des pâtes ou de la farine, le souffle court et la tension élevée d’une reprise professionnelle, pour se sortir de cette crise et la limiter au maximum, l’estomac plein après un bon repas au restaurant, l’envie dévorante d’un film au cinéma ou le coeur battant au rythme d’un concert, moi, j’ai un petit peur d’y retourner.

Plus les jours passent, plus les heures défilent, moins j’ai envie de retrouver la vie d’avant, dans cette composante « métro – boulot – dodo », qui m’épuise et m’empêche d’avoir le temps, ce temps nécessaire pour lire encore plus, écrire et prendre le temps de coucher mes idées sur des bouts de papier, jouer du piano et progresser, prendre du temps pour moi surtout… Cette période me fait prendre conscience que le temps est sans doute l’une des choses les plus précieuses, avec la santé bien-sûr. Le temps qui passe, le temps qui vient à manquer, le temps qu’on laisse filer, le temps que l’on ne doit pas regretter. Et force est de constater qu’en ralentissant ne serait-ce qu’un peu la cadence, chacun trouve du temps, son temps pour faire plus de choses évidemment, mais aussi et surtout des choses qui font du bien ; j’en vois beaucoup qui cuisinent, qui lisent, qui écrivent, qui font de la peinture, qui écoutent de la musique; j’en vois aussi qui réfléchissent, comme moi; j’en vois qui profitent enfin de leur chez-eux, de leurs enfants, des leurs; j’en vois enfin qui se surpassent pour les autres, qui se découvrent une fibre de héros moderne et que je salue.

Plus les jours passent, plus les heures défilent, moins j’ai envie de retrouver le Monde d’avant; celui où sont mis en avant les profits, les performances, les beautés parfaites, les sans-fantaisies, les normés. J’aimerai penser que cette période fera dévier la course folle du Monde mais je ne suis pas si rêveuse. Une fois sortis et passée l’euphorie de nos retrouvailles, nous retournerons tous à nos travers : individualisme, compétition, égoïsme, insensibilité. Nous oublierons que la Nature se porte mieux sans notre frénétique marche aux progrès, sans nos embouteillages, sans notre surproduction, sans nos gaz qui l’étouffent. Nous oublierons que c’est ensemble que l’on s’en sort, que c’est en faisant front commun qu’on fait changer le cours des choses. Nous oublierons aussi qu’il n’y a pas de frontière, qu’il n’existe qu’un Être humain, une poussière dans l’univers, pas si fort face à un virus. D’autres oublieront que disposer de services publics comme les nôtres est une chance, un privilège, avec nos services hospitaliers, nos services sociaux, nos services de ramassage d’ordures, nos services d’éducation, dont on ne fait d’ailleurs louanges que quand ils ne sont plus présents ou quand ils fonctionnent moins bien.

L’après ne me fait pas encore si envie, même si je suis comme vous : je voudrai revoir mes proches, ma Mam, mes amis, ceux et celles que j’aime et qui sont loin, à des kilomètres mais si près, je voudrai retourner à mes cours de piano du samedi, pour apprendre et échanger avec Bruno, mon professeur, je voudrai retourner acheter des livres à la librairie, je voudrai repartir en voyages, je voudrai voir la mer, je voudrai sentir le vent du Lac de Garde et marcher dans les montagnes de l’Alto Adige, je voudrai aller à un concert… Et pour le reste, je continuerai à lire des romans qui me passionnent, à écrire sur mes carnets et ici, à chanter à tue-tête les chansons de Marco Mengoni, à rire de tout, à travailler, à profiter de la vie, à aimer, à partager, à apprendre…

Le confinement ne changera rien pour certains, mais il changera peut-être beaucoup de choses pour d’autres. Comme un pénitent qui fait ses Pâques (c’est de saison !), nous profiterons peut-être de ce moment, pour faire évoluer nos vies, nos pensées, nos réflexions, pour n’en conserver que l’essentiel, celui qui fait battre le coeur et arrêter un instant la course folle du temps. 

 

2 réflexions sur “Une réflexion pascale

  1. Anonyme dit :

    Le confinement est en quelque sorte une privation de liberté mais je pense au contraire que ce moment devrait nous permettre de penser, de réfléchir pour revenir à l’Essentiel …Sur cette planète nous sommes là …par hasard et nécessité…comme des fourmis sur un petit caillou qui va se disloquer alors profitons de ce Temps pour envisager une vie plus belle et Humaine …….
    Mam…

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